Guillaume II de Hohenzollern

Plan :


Naissance
Famille - Origines -
Parents
Caractère
Aspect physique
Education
Mariage

1) Guillaume II et Bismarck : la cohabitation - 1888-1890

2) Guillaume II et Caprivi - 1890-1894 -

3) Guillaume II et Hohenlohe (1894-1900)

4) Guillaume II et Bülow (1900-1909)

5) Guillaume II, la flotte et la politique mondiale (1890-1908)

6) Une "crise morale" (1906-1908)

7) La chute de Bülow

8) Guillaume II et Bethmann-Hollweg (1909-1917)

9) L'idée d'une guerre préventive

10) Guillaume II, la guerre et la chute de la monarchie

11) L'exil en Hollande (1918-1941)

 

- Frédéric Guillaume Victor Albert = Friedrich Wilhelm Viktor Albert

Naissance :

Le 27 janvier 1859 au château de Potsdam. C'est un accouchement très difficile qui lui vaut une paralysie totale du muscle de l'épaule gauche et du bras due à une pression ou contusion des muscles et ligaments, à la naissance.

Famille - Origines - :

La famille Hohenzollern descend de Frédéric, comte de Zollern (mort vers 1201) et se divisa en deux branches. La branche de Souabe, qui resta catholique, ne joua pas de rôle majeur dans l'histoire allemande. Elle se subdivise elle-même en plusieurs rameaux, dont celui de Sigmaringen qui donna à la Roumanie sa maison princière puis royale. La branche francorienne, devenu luthérienne au XVIe siècle, dut sa fortune à Frédéric VI (mort vers 1440), qui acquit l'électorat de Brandebourg (1414). Ayant hérité de la Prusse (1618), les Hohenzollern en deviennent roi (1701) et acquirent la dignité impériale en 1871 avec Guillaume Ier.

- Parents - Père :

Frédéric-Guillaume (1831-1888) dit "Fritz". Le Kronprinz épouse en janvier 1858 Victoria Adélaïde Marie Louise, femme d'esprit vif, fière et intelligente. Elle aura toujours une grande influence sur son époux. Née en 1840, elle vivra jusqu'en 1901. Le Kronprinz a de mauvais rapports avec son père, Guillaume Ier car le couple est isolé de tous. Le peuple allemand et même Bismarck détestent ce couple trop libéral. Frédéric-Guillaume est pourtant taciturne, très pieux et fier de ses ancêtres Hohenzollern.

Il est atteint d'une tumeur du larynx, en 1886. Il refuse toute intervention chirurgicale, préférant un grand repos.

La famille est alors divisée, plus préoccupée de l'avenir que du malade. Le 9 mars 1888, le vieil empereur Guillaume Ier meurt. Le Kronprinz prend alors le nom de Frédéric III mais il est conscient de sa maladie. Il parle très peu, communiquant avec les autres par écrit. Le règne de Frédéric III est appelé les "Cent Jours". Le 15 juin 1888, soit moins d'un an après la succession, Frédéric III décède, amoindri par la maladie. 1888 est l'année des trois empereurs.

Grand-père : Guillaume Ier (Berlin, 1797 - id, 1888) :

Fils de Frédéric-Guillaume III, il gouverna comme régent à la place de son frère Frédéric-Guillaume IV, atteint de maladie mentale (1858), puis lui succéda en 1861, devenant alors Roi de Prusse. Ne pouvant pas obtenir les crédits militaires pour la réforme de Moltke, il appela à la présidence du Conseil Bismarck (1862). Celui-ci, détint dès lors le pouvoir réel. A l'issue de la guerre franco-prussienne (1870-1871), Guillaume Ier fut proclamé empereur allemand au château de Versailles, le 18 janvier 1871.

 

Grand-mère maternelle : Victoria (Londres 1819 - Osborne 1901) :

 

Elle accéda au trône d'Angleterre après la mort de son oncle Guillaume IV. En 1840, elle épousa Albert de Saxe-Cobourg Gotha (mort en 1861). Devenue souveraine à marquer de son empreinte personnelle en politique, elle restaura le prestige monarchique, "l'ère victorienne" correspondant au sommet de la puissance britannique. En 1876, Disraeli la fit couronner Impératrice des Indes.

- Caractère -

Il est certain que l'éducation, très stricte, de Guillaume n'est pas sans effet sur son caractère. Guillaume II est de nature inconstante. ne sachant jamais se concentrer sur quelque chose de précis pendant longtemps, il s'attire les critiques de son entourage. On reproche souvent au Kaiser son changement d'opinion pour un projet de loi ou autre, voulant, puis ne voulant plus ! Cette "hyperactivité" est due à son enfance, à des parents peu présents et ingrats et à son précepteur (Georg Ernst Hernzpeter) très / trop exigeant, alors que le futur empereur est peu cultivé... Il ne s'intéresse guère à la lecture (sauf aux coupures de presse). Il a de vrais goûts artistiques venant de sa mère. Il adore la chasse, l'archéologie, l'armée et surtout la flotte. Guillaume II a un besoin maladif de reconnaissance, un goût des discours sonores et menaçants. Il aime et déteste la Grande-Bretagne. Parfois hystérique, il est incapable d'accorder une attention soutenue à un problème. Guillaume II privilégie l'armée et la marine. Pour lui, ceci est le plus important. Il adore ces deux matières dans lesquelles il consacre beaucoup de temps. Le souverain aura toujours un besoin incessant pour les voyages.

- Aspect physique -

Guillaume II a un visage très dur. Il a des cheveux blonds et des yeux bleus. Sa taille est assez grande. Il porte la moustache, relevée vers le haut, ce qui est à la mode de l'époque. Ce qui sera le plus difficile à vivre sera son bras gauche, atrophié, même s'il sera toujours un excellent fusil pour la chasse. Il souffrira beaucoup quand on l'apprit à monter à cheval car il doit se débrouiller avec un seul bras. Plus tard, Guillaume II apprendra à utiliser son bras gauche pour porter son chapeau ou autre.

 

Fin septembre 1872 : première chasse avec son père. Il tue un faisan. Dès lors, il aura une grande passion pour la chasse.

Septembre 1874-1877 : Guillaume suit ses études au lycée de Cassel

Janvier 1877 : Il reçoit son baccalauréat avec mention bien. Etant majeur, sa résidence sera à Potsdam.

Décembre 1877-1879 : Il suit ses études à l'université de Bonn

- Education -

Guillaume II aura comme gouverneur-précepteur Georg Ernst Hernzpeter. Ce sera une éducation libérale, en rupture avec la tradition prussienne. Il aura aussi un apprentissage militaire des héritiers du trône.

- Mariage -

Il faut savoir que Guillaume II aura beaucoup de relations extraconjugales. Pourtant, le 27 février 1881, Guillaume épouse Augusta Victoria, appelée Donna, princesse de Schleswig-Holstein, appartenant à une branche de la famille royale de Danemark. La première rencontre a lieu en août 1878. Pas très belle, l'impératrice est très pieuse et d'un naturel calme. Ensemble, ils auront sept enfants. Augusta Victoria n'accepte pas la défaite allemande de 1918 et ne s'en remet pas. Elle rejoint son époux le 28 novembre 1918, dans un état physique très précaire. Souffrant du coeur, et de problèmes circulatoires graves, elle ne quitte sa chambre que par chaise roulante. Décédée le 11 avril 1921, elle est enterrée dans le mausolée royal du nouveau palais de Potsdam.

 

1) Guillaume II et Bismarck : la cohabitation - 1888-1890

 

1888 est une année d'observation pour Guillaume II. Il fait des voyages incessants. En fait, la période 1888-1890 est une lutte entre un jeune souverain ambitieux et un vieux chancelier. Il est certain que Guillaume II est très différent de son grand-père. Dans les premières années, on salue le jeune empereur. L'Allemagne l'apprécie beaucoup. Il y a même une grande hausse de l'économie. Il consacre beaucoup de temps au domaine militaire. Il fait des voyages en Italie, Autriche-Hongrie, Russie et bien sûr dans toute l'Allemagne. En 1889, la popularité de Guillaume a atteint son sommet. Il ne cesse guère ses activités nombreuses. Le premier objet de différents est la politique russe. En effet, Guillaume II pense qu'une guerre contre la Russie est inévitable. En février 1889, il garantie à François-Joseph que l'Autriche-Hongrie peut compter sur le soutien allemand, en cas de conflit contre la Russie. Bismarck, quant à lui, souligne l'importance d'une entente avec la Russie : c'est une première grande compétition. Guillaume II a, au début de son règne, la volonté d'aider les ouvriers. Il fait voter par le Reichstag une grande loi sociale sur les ouvriers. Bismarck, quant à lui, propose une loi de renforcement de l'antisocialisme. Finalement, Bismarck est forcé de démissionner, le 20 mars 1890.

2) Guillaume II et Caprivi - 1890-1894 -

Durant quatre années, le général Léovon Caprivi reste à la chancellerie. Il a la lourde responsabilité de succéder au vieux chancelier Bismarck. Mais très vite, les relations se détériorent, surtout au printemps 1890. Guillaume le trouve têtu. Caprivi s'efforce de mener une politique nouvelle, mieux adaptée à l'évolution économique et nouvelle de l'Allemagne, mais s'est heurté très vite aux intérêts agrariens.

-> Loi militaire (juillet 1893) - traité de commerce avec la Russie (mars 1894)

Caprivi démissionne suite à une lassitude partagée, lassitude de Guillaume II face à la rigidité au style solennel à l'indépendance de caractère et aux menaces répétitives de démission du chancelier, lassitude du Chancelier face aux inconséquences du souverain.

3) Guillaume II et Hohenlohe (1894-1900)

Nommé en octobre 1894, Chlodwig prince zu Hohenlohe - Schillings Fürst est l'oncle de l'impératrice Augusta Victoria mais refuse de tutoyer l'empereur. Hohenlohe est intelligent, calme et réfléchi ; il est très vieux (75 ans). Dans tous les esprits, il s'agit d'une chancellerie de transition, en attendant que l'Empereur ait trouvé l'homme qui lui convient. En fait, la capacité du chancelier Hohenlohe à gérer les crises lui permet de se maintenir près de six ans.

-> Loi autorisant les associations politiques à se fédérer (6 décembre 1899). Code civil (1896) - loi contre la prostitution (début 1900) - Réforme du Code Pénal militaire (mars 1899).

A partir de 1898, l'Empereur met à l'écart Hohenlohe, qui n'a plus d'influence sur l'Empereur et celui-ci négligeant ses avis.

Il démissionne le 15 septembre 1900

4) Guillaume II et Bülow (1900-1909)

 

Avec le chancelier Bülow, c'est la période où le "régime personnel" de Guillaume II arrive à sa perfection, le chancelier lui étant entièrement dévoué.

Né à Holstein en 1849, Bernand von Bülow, fils d'un diplomate est secrétaire d'État aux Affaires Étrangères de Bismarck de 1873 à 1878. Bülow est ambitieux, entièrement dévoué à sa carrière. On dit de lui qu'il exploite les gens en témoignant de beaucoup d'amitié et d'affection. D'abord secrétaire d'État aux Affaires Étrangères de Bismarck, il est fait Comte en 1899, décoré de l'Aigle Noir en décembre 1900, on le fait même prince, en juin 1905. Menteur et hypocrite, Bülow est très porté sur la personne, travaillant son aspect dans la presse. Bülow n'a pas de grands projets de réforme à l'intérieur et se contente de gérer le statut quo avec pour objectif le renforcement de la monarchie et de l'unité allemande.

La chancellerie de Bülow de 1900 à 1908, considérée comme la période "classique" du "régime personnel", est en fait la période de plus grande retenue de Guillaume II, qui n'intervient que très peu en politique intérieure et dont les discours se font même plus rares après 1902. Mais si l'Empereur se fait plus discret en politique intérieure, il n'en est pas de même pour la politique extérieure qui est son domaine de prédilection et qu'il considère comme le domaine réservé des souverains.

5) Guillaume II, la flotte et la politique mondiale (1890-1908)

 

        Le règne de Guillaume II est marqué par le passage progressif d'une politique extérieure centrée sur l'Europe à une politique mondiale. Depuis 1871, la croissance de la population ne cesse de progresser : + 20 % et plus de 30 % de 1890 à 1911, passant ainsi de 41 millions d'habitants en 1871 à 67 millions en 1913. Il y a aussi un réel essor économique et urbain. En 1907, l'industrie représente plus de 42 % des emplois ; en 1910, plus de 60 % de la population vit dans les villes, et plus de 21 % dans les villes de plus de 100 000 habitants. Résultat : très forte expansion commerciale. L'Allemagne devient la seconde puissance industrielle mondiale, après les États-Unis.

La rupture avec Bismarck contribue à une redistribution des cartes de l'Europe. Alors que le vieux chancelier avait toujours veillé à maintenir les liens avec la Russie, ses successeurs refusent de renouveler le traité secret de 1887, favorisant ainsi un rapprochement progressif entre la France et la Russie, mais sans parvenir à la coopération souhaitée avec la Grande-Bretagne. On identifie souvent la "politique mondiale" de l'Allemagne à la personnalité de Guillaume II, lui attribuant l'essentiel de la responsabilité des excès et des erreurs de cette politique et surtout, une responsabilité essentielle dans l'isolement croissant de l'Allemagne et dans les origines de la Grande Guerre.

Il est trop souvent dit que Guillaume II est à l'origine de l'isolement croissant de l'Allemagne, car l'Empereur n'est pas seulement l'inspirateur de cette politique, conçue par Holstein et Bülow, et qu'il ne se prête qu'avec beaucoup de réticences à leur politique marocaine (1905). Guillaume II souhaite à tout prix une alliance avec la Russie, trop proche de la France, refuse à plusieurs reprises des Traités, en particulier celui proposé en 1904. Entre-temps, une crise marocaine se produit. Guillaume, influencé par le chancelier, débarque à Tanger et fait un discours humiliant la position française dans ce pays.

Parallèlement à l'affaire marocaine, Guillaume II prend, cette fois personnellement, une nouvelle initiative du côté de la Russie, qui mène à la signature du Traité de Björko, le 24 juillet 1905. Après quelques mois d'optimisme sur les relations germano-russes, Guillaume II est vivement déçu lorsque le tsar demande, le 7 octobre, une suspension du Traité de Björko jusqu'à ce que la France précise si elle a l'intention de se joindre aux deux puissances : la France ne laissait aucun doute sur ses intentions (se joindre au Traité signifierait une reconnaissance de la perte de l'Alsace-Lorraine), le tsar propose alors une modification du traité; malgré l'insistance de Nicolas II, Berlin refuse la déclaration, et en reste au Traité initial, mais en sachant qu'il n'a pas de valeur. La déception de Guillaume II est grande.

L'échec du "coup de Tanger " (puisque l'Allemagne est obligée de s'excuser) et la valeur très limitée du Traité de Björko manifestent à l'évidence la solidarité de l'alliance franco-russe et de l'Entente cordiale, et l'échec de la tentative allemande pour empêcher un rapprochement anglo-russe grâce à la Constitution d'un bloc continental dirigé contre l'Angleterre.

Par son intérêt soutenu pour l'expansion de la flotte de guerre allemande à partir de 1894-1895, Guillaume II a, même s'il n'a pas conscience, une influence décisive sur la situation internationale de l'Allemagne, car cette politique ambitieuse provoque l'inquiétude, puis l'hostilité de la Grande-Bretagne qui se rapproche de la France (1904), puis de la Russie (1907) et contribue de manière décisive à l'isolement allemand en Europe. La politique navale est d'abord conçue comme un instrument de sécurité pour l'Allemagne et son commerce mondial.

L'accession au trône de Guillaume II marque la fin du déclin relatif de la flotte allemande par rapport aux principales puissances continentales. De plus, Guillaume est passionné par la mer depuis l'enfance. Pour lui, la flotte est d'abord un moyen de prestige. Guillaume II soutient cette politique par ses encouragements et ses interventions, parfois maladroites. Bülow est d'ailleurs favorable à une politique d'expansion mondiale et partisan d'une flotte puissante. Le 28 mars 1898, un programme naval, fruit de Tirpitz, est voté par 212 voix contre 139, avec le soutien d'une grande partie du Zentrum. 408 millions de crédits sur sept ans pour la construction d'une flotte est accordée. Guillaume II et Tirpitz présentent une nouvelle loi navale, plus ambitieuse, qui dans la quantité de production est presque la double de celle de la loi de 1898. Ceci n'inquiète toujours pas la Grande-Bretagne, plus sensible aux menaces de la France qui a la deuxième flotte mondiale, et préoccupée de la montée de nouvelles puissances navales dans le Pacifique, les États-Unis et le Japon.

Guillaume II est persuadé que son oncle, Édouard VI, est jaloux de l'essor économique et commercial de l'Allemagne et conspire contre elle. Quant à Édouard VII qui n'a jamais apprécié son neveu, il le rend personnellement responsable de tous les actes de l'Allemagne. C'est dans ce contexte que commence une course à l'armement naval entre l'Allemagne et la Grande-Bretagne. Ainsi, en mai 1906, une nouvelle loi accordant tous les crédits nécessaires pour porter le rythme de construction à 3 vaisseaux par an jusqu'en 1910, est votée par le Reichstag. Pourtant, Guillaume II pense que la Grande-Bretagne préfèrera, à cause des menaces de l'Allemagne, trouver un compromis ; il dit d'ailleurs : "Les navires de guerre coûtent, après tout, moins cher que la guerre".

Une loi navale complémentaire est accordée en mars 1908, prévoyant la construction annuelle de 4 vaisseaux de type dreadnought. A la fin du programme, en 1920, l'Allemagne disposerait de 33 navires. Guillaume II et son frère Heinrich ont un rôle très important dans l'accélération du programme de construction navale de l'Allemagne. La flotte allemande doit devenir à terme la deuxième flotte mondiale. L'année 1906 est marquée en Allemagne par une sorte de "crise morale" qui s'élargit à la faveur de "l'affaire Eulenberg" et culmine en une crise politique en novembre 1908 et la chute du chancelier Bülow.

6) Une "crise morale" (1906-1908)

 

L'affaire marocaine, l'isolement croissant de l'Allemagne mais surtout le règne personnel de Guillaume II déçoivent beaucoup une partie de l'Allemagne. On s'était pourtant réjouit en 1888 de l'accession au trône d'un souverain jeune et plein d'énergie, succédant à un souverain âgé et à un souverain malade, et on avait cru y voir les perspectives d'un avenir brillant pour l'Allemagne. En 1907-1908, une grave crise politique fait chuter le conseiller Eulenberg, jeté par le Kaiser, qui était pourtant son meilleur ami, mais accusé d'homosexuel, ceci étant réprimandé par le Code Pénal.

        Parallèlement, Guillaume II continue son projet naval pour l'Allemagne. Cependant, l'Empereur est inquiet, très vexé des relations avec la Grande-Bretagne qui sont très tendues. De plus, Édouard VII entretient de bonnes relations avec le Tsar de Russie. Ceci ennuie Guillaume qui répète sans cesse que le but de la flotte allemande n'est pas de ridiculiser ni de rivaliser avec la Grande-Bretagne mais bien de protéger le commerce maritime de l'Allemagne à l'étranger. Aussi, le Kaiser fait paraître en octobre 1908 un article dans le Daily Telegraph et dans lequel il exprime son vou de rapprochement avec la Grande-Bretagne tout en vantant l'Allemagne et surtout lui-même. Il déclare notamment être l'ami de l'Angleterre même si la presse anglaise ne lui facilite pas la tâche en insinuant qu'il n'est pas sincère. Il ajoute ensuite que la construction navale est nécessaire pour protéger le commerce et les intérêts allemands dans le monde, en particulier en Extrême-Orient. Cet article suscite la consternation en Grande-Bretagne. Même en Allemagne on s'indigne de cet article. Le grand reproche est celui d'isoler encore plus l'Allemagne dans le monde. La première réaction de la presse allemande est critique à l'égard de Bülow et certains demandent même sa démission.

Aussi, Guillaume II est-il plutôt satisfait de l'effet de son entretien et des réactions qu'il suscite en Allemagne. Il est persuadé de sa totale innocence dans l'affaire. Il refuse à plusieurs reprises la démission du chancelier. Une grave crise se joue en 1908-1909.

7) La chute de Bülow

 

Mais la crise se retourne contre Guillaume. Durant un voyage en Autriche, le Chancelier Bülow profite de la situation pour rejeter toute la responsabilité sur l'Empereur. Guillaume, revenu d'Autriche, apprend ces nouvelles et est profondément déçu après la lecture de discours de Bülow. Guillaume II dit sa déception de la trahison de Bülow, qu'il a toujours considéré comme un fidèle ami, et qu'il le renverrait après l'adoption d'une loi fiscale. Guillaume II reste dans un refroidissement avec lequel s'ajoute la dépression. L'Empereur est convaincu qu'il est "le grand martyr de son temps".

Après cette crise, les relations entre le souverain et le chancelier perdent définitivement leur chaleur antérieure ; les rencontres sont d'ailleurs plus rares. Plus jamais l'Empereur reprendra toute son assurance, ce qui pourra expliquer jusqu'en 1914 et pendant la guerre. Deux lois sont votées en 1908. L'une, votée en avril, sur les associations assez libérales, l'autre, introduisant un marché à terme à la Bourse de Berlin. La loi fiscale, tant attendue, est un échec, rejetée le 10 juillet 1909.

Bülow démissionne le 14 tandis que Bethman-Hollweg accepte la chancellerie. Guillaume II déclare alors qu'il faut à présent restaurer l'autorité du gouvernement de l'Empire et des gouvernements fédéraux face au Reich.

Bülow fut surtout discrédité aux yeux de l'Empereur et du Reichstag dans l'affaire du Daily Telegraph. Il aurait voulu plus s'appuyer sur le Reichstag pour menacer le souverain de son régime personnel. En effet, il est certain que Guillaume souhaite un régime centré sur lui-même. Pour lui, les Hohenzollern sont de droit divin les Empereurs de l'Unité allemande, contredisant ainsi la Constitution de 1871. Pour lui toujours, l'Histoire est providentielle et ses ancêtres sont des élus de Dieu.

Mais pour Bülow, cela échoua...

La période qui mène de 1909 à 1914 offre un contraste de plus en plus frappant entre une Allemagne prospère (une économie dynamique et remarquable) et une société politique bloquée à l'intérieur et l'isolement extérieur croissant.

8) Guillaume II et Bethmann-Hollweg (1909-1917)

 

La nomination à la chancellerie de Bethmann-Hollweg n'est pas le choix de Guillaume II. Il le connaît pourtant depuis une trentaine d'années, depuis que, jeune lieutenant, il chassait en Brandebourg, dans la propriété des Bethmann-Hollweg. Fils d'un professeur et homme politique, issu d'une famille de banquiers francfortois, Theobald von Bethmann-Hollweg a fait une carrière administrative brillante. Malgré les réticences de l'Empereur en 1909, il ne s'en séparera qu'avec beaucoup de regrets et sous la pression du haut commandement militaire, en juillet 1917. Il ne manque pas de qualités intellectuelles et morales. Intelligent et très cultivé, c'est un honnête homme qui a un grand sens du devoir et de la bienveillance. Très grand, il semble lourd et emprunté, mais c'est un bon orateur, capable d'improvisations brillantes. Il inspire la confiance et en impose par son sérieux et sa connaissance des dossiers.

Entre l'Empereur et le Chancelier, ce sont des relations très amicales et chaleureuses. C'est une forme de respect mutuel. Durant toute la période Bethmann-Hollweg, on assiste aux règles strictes de la Constitution et donc la mise en sommeil pour un temps des prétentions de droits divins.

9) L'idée d'une guerre préventive

 

Depuis le début de l'Empire allemand, l'idée d'une guerre préventive contre la France et / ou la Russie est l'objet de discussions dans les milieux militaires. Il s'agit d'assurer "définitivement" la sécurité de l'État menacé par la France, l'ennemie irréconciliable, et par la moitié de la puissance russe en voie de modernisation sociale et économique. A la suite du rapprochement franco-russe, l'État-major allemand élabore des plans d'opérations pour faire face à une éventuelle guerre sur deux fronts. Le général Alfred von Schlieffen, chef de l'État-major de 1891 à 1905, envisage à partir de 1892 une guerre préventive contre la France et prépare des plans successifs d'opérations. A la suite de l'Entente cordiale d'avril 1904, puis de l'échec du Traité de Björko avec la Russie, il dresse un nouveau plan qui trouve sa forme définitive dans un mémorandum de décembre 1905. Il privilégie, mettant à profit la lenteur de la mobilisation russe, une grande offensive à l'Ouest pour anéantir rapidement l'armée française et se retourner ensuite contre la Russie. Le projet prévoit aussi la violation de la neutralité de la Belgique et du Luxembourg, et éventuellement de la Hollande, pour mener une vaste manouvre d'encerclement de l'armée française par le Nord. Quelques modifications de détails seront apportées par Molke le Jeune, en 1900. C'est celui qu'il appliquera en août 1914 et qui échouera sur la Marne.

Le chancelier et le souverain sont de plus en plus critiqués pour leur inaction alors que l'entourage même de l'Empereur souhaite un conflit. On trouve Guillaume II trop "pacifiste" dans les milieux militaires. L'opinion semble aussi trouver nécessaire une guerre préventive.

Mais dès octobre 1912, en pleine crise balkanique, Guillaume se dit certain qu'une guerre éclatera. Il prend un ton guerrier mais prudent. Oui à un conflit, mais à un conflit localisé.

Ainsi, un conflit se déclare entre les Balkans, soutenus par l'Allemagne et surtout par Guillaume II qui parle même d' "États-Unis des Balkans", et la Turquie (Empire ottoman). La rapide défaite de la Turquie, écrasée par les Balkans, menace alors l'Autriche-Hongrie, qui ne veut pas d'un accès serbe à l'Adriatique, Guillaume II répondant qu'il n'y a pas de raison de s'opposer aux voux de la Serbie. Le chancelier aura beaucoup de difficulté à convaincre l'Empereur de la nécessité de soutenir l'Autriche-Hongrie dans la tension croissante avec la Russie en novembre et décembre 1912. Ils sont persuadés qu'avec l'aide britannique on parviendra à une solution pacifiste.

Le 3 décembre 1912, la Grande-Bretagne déclare pourtant qu'elle ne pourrait rester spectatrice si l'Autriche-Hongrie provoquait une guerre européenne en agressant la Serbie, et qu'elle ne pourrait "en aucun cas accepter une défaite française remettant en cause l'équilibre européen". Guillaume II en lisant ce rapport est vexé et juge la Grande-Bretagne jalouse de la puissance allemande. Au "Conseil de guerre" du 8 décembre, il tire les leçons : "l'Autriche-Hongrie doit être ferme face aux Serbes , à moins de perdre son empire sur les Slaves de la Double monarchie ; si la Russie soutient les Serbes, ce qui semble probable, la guerre sera aussi inévitable pour nous".

Le 11 décembre, il déclare à l'ambassadeur austro-hongrois qu'il espère que la paix sera préservée. Lorsque la situation se détend, il l'assure cependant, le 30 janvier 1913, que "l'Allemagne se joindra à l'Autriche-Hongrie avec toutes ses forces, si elle est impliquée dans une guerre", tout en ajoutant qu'il ne souhaite pas la guerre.

Suite à la deuxième crise balkanique, on constate que Guillaume II ne souhaite à aucun moment une guerre européenne, mais qu'il n'est pas hostile à un conflit localisé dans les Balkans, pour "purger" la situation. Guillaume II reste partisan de la paix et insiste dans ses déclarations fréquentes à partir de 1912 - 1913 sur la paix en Europe. Quand il apprend l'assassinat de l'archiduc austro-hongrois François-Ferdinand, et de son épouse, il rentre aussitôt à Berlin (il était en voyage d'une semaine à Kül) pour prendre la situation en main et préserver la paix en Europe.

Guillaume II est indigné de l'assassinat de son ami François-Ferdinand, ce qu'il considère comme une atteinte au sentiment monarchique et un affront aux Habsbourgs. Après une entrevue avec son chancelier et suite à une lettre de François-Joseph, Guillaume II déclare le 5 juillet 1914 à l'ambassadeur autrichien : "Vous pouvez compter, dans ce cas également, sur le total soutien l'Allemagne".

Mais rien de permet d'affirmer que l'Empereur et le chancelier sont partisans d'une guerre préventive contre la France et la Russie. Guillaume est toujours persuadé que la Grande-Bretagne se rangera aux côtés des Empires centraux. A ce moment-là, c'est-à-dire en juillet 1914, Guillaume II est certain qu'il n'y aura pas de guerre, car la Russie et la France ne sont pas prêtes, et que la Serbie acceptera l'ultimatum austro-hongrois. Il est aussi persuadé que tout sera réglé d'ici au 15 juillet.

Le calcul de Berlin suppose une action rapide de l'Autriche-Hongrie pour exploiter l'émotion. Mais elle est repoussée par des réticences austro-hongroises à envisager une guerre contre la Serbie. Aussi, l'ultimatum austro-hongrois n'est-il remis à la Serbie que le 23 juillet. Pendant ce temps, Guillaume ne semble pas inquiet et est en croisière. Le 25, il décide de rentrer à Berlin, ayant appris l'ultimatum. Le 28 au matin, Guillaume lit pour la première fois la réponse serbe à l'ultimatum, celui exigeant la participation autrichienne à l'enquête sur le complot du 28 juin 1914.

Guillaume II se félicite du grand succès moral de Vienne et exclut l'hypothèse d'une guerre. Il est d'ailleurs surpris que les Autrichiens aient donné un ordre de mobilisation partielle et ignore que la déclaration de guerre est imminente. Il ordonne de faire savoir à Vienne qu'il n'y a plus de cause de guerre et qu'il est prêt à une médiation de paix.

Après plusieurs essais de médiation par télégrammes avec la Russie et sous la pression de l'entourage militaire, Guillaume II envoie un ultimatum de douze heures à la Russie exigeant l'arrêt immédiat de la mobilisation, et un ultimatum de dix-huit heures à la France, exigeant des garanties de neutralité, le 31 juillet 1914 à 17 heures.

Dès le 30, le chancelier a conscience que les évènements sont en train d'échapper à tout contrôle. Processus : sommation à la Belgique, le 2 août, déclaration de guerre à la France, entrée des troupes allemandes en Belgique et ultimatum britannique à l'Allemagne le 4. Durant ces évènements, Guillaume est calme, mais démoralisé de voir détruire sa réputation "d'Empereur Paix", furieux de la trahison britannique et de la "légèreté inconsciente" de Nicolas II.

Alors qu'il ne veut pas de guerre européenne, Guillaume II prend un certain nombre de décisions qui contribuent à y mener. Le 5 juillet, il assure François-Joseph du soutien allemand contre la Serbie. On note cependant, qu'il s'assure de l'approbation du chancelier et que ses assurances vont dans le sens de la politique de Bethmann-Hollweg dont la priorité est de ne pas perdre la confiance de l'Autriche-Hongrie et d'éviter qu'elle ne soit humiliée face à ses peuples slaves.

Guillaume II prend, à deux reprises, des initiatives pour mettre un frein à l'évolution menaçante vers une guerre européenne. Le 28 juillet, il donne ordre d'avertir Vienne qu'il estime la réponse de Belgrade satisfaisante et qu'il n'y a plus lieu d'intervenir militairement. Il propose même sa médiation. Mais le chancelier ne transmet pas intégralement ses instructions à Vienne, car il craint de perdre la confiance de l'Autriche-Hongrie.

Le 1er août, Guillaume II tente de stopper le processus de la mobilisation dès qu'il est question de neutralité britannique. Il impose sa volonté à un chef d'État-major qui prétend qu'il n'est plus possible d'arrêter la machine militaire.

-> La responsabilité de Guillaume II n'est pas dans les décisions successives qui mènent à la guerre, décisions prises par le chancelier. La responsabilité de l'Empereur nous renvoie aux faiblesses de sa personnalité. Il est incapable d'une attention soutenue et ses nerfs fragiles ne lui permettent pas de supporter une longue tension comme celle de juillet 1914. A quoi s'ajoutent un manque de fermeté et un caractère influençable.

10) Guillaume II, la guerre et la chute de la monarchie

 

"Nous ne sommes poussés par aucun désir de conquête" déclare Guillaume II au Reichstag le 4 août 1914.

Le Jubilé du règne de Guillaume en 1913 a montré que, malgré ses imperfections, l'Empereur est populaire à la veille de la Grande Guerre. Il est le symbole de l'État national allemand.

Selon l'article 63 de la Constitution, l'ensemble des forces militaires est placé sous le commandement de l'Empereur. Mais sur le modèle de son grand-père, Guillaume II transfère ses pouvoirs au chef d'État-major, le Général Helmut von Moltke, qui a le commandement effectif de l'armée.

Tous les jours, aux environs de 11 heures, le chef d'État-major fait un rapport d'une heure à l'Empereur. Il se contente de généralités, ou au contraire l'inonde de détails, en présentant les choses de manière à ce qu'il approuve les décisions déjà prises.

L'Empereur est très isolé et restera toute la guerre au grand quartier général, dans un milieu presque exclusivement militaire, ce qui l'isole des réalités de la vie et de la population allemande. En général, l'Empereur se contente d'approuver des décisions déjà prises. En fait, il est incapable de juger d'opérations très complexes et il est rarement sollicité par l'État-major. A plusieurs reprises, Guillaume II se plaindra d'être mis au courant trop tard, après que les évènements se soient produits ! Si l'on n'informe le Kaiser des opérations importantes après coup, c'est par crainte d'interventions intempestives, mais aussi pour ménager ses nerfs fragiles.

Durant la Grande Guerre, l'Empereur connaît de grands effondrements nerveux et des phases d'excitation et de dépression. Son entourage est satisfait lorsqu'il se détend à scier du bois, à jardiner, à chasser et à lire des rapports archéologiques.

Mais l'Empereur a un pouvoir de nomination indiscutable, en particulier du chef d'État-major, ce qui lui assure un rôle décisif. Après l'échec du plan Schlieffen, en partie dû au fait que Moltke laisse trop de liberté d'initiative à ses généraux, celui-ci est remplacé par le ministre de Guerre Falkenhayn, nommé quartier-maître général le 14 septembre 1914, puis chef d'État-major le 3 novembre 1914. Falkenhayn est un choix personnel de l'Empereur.

Après la victoire de Tannenberg sur le front Est, Hindenburg devient très populaire, à tel point qu'il fait de l'ombre au Kaiser. Fin juillet 1916, Guillaume II accepte de confier le commandement du Front Est, y compris la partie nord à Hindenburg et à son adjoint Ludendorff.

Le succès de l'offensive russe du Général Broussilov et la déclaration de guerre de la Roumanie d'août 1916 convainquent l'Empereur de remplacer Falkenhayn. Il nomme Hindenburg chef d'État-major, et Ludendorff quartier-maître. Leur arrivée signifie une diminution sensible de l'influence de l'Empereur. Il n'adhère jamais totalement aux buts de guerre de Hindenburg et Ludendorff et le montre à plusieurs occasions. Guillaume II ne perd jamais de vue l'objectif de la paix. Mais malgré ce désir, sa position est incertaine, influencé par le haut commandement l'isolant très largement des réalités allemandes. Il n'a ni la fermeté ni la constance pour imposer une ligné directrice dans la question des buts de guerre et de la paix.

Un hiver 1916-1917 particulièrement rude, la révolution russe de février et la diminution de la ration de pain nourrissent une grande insatisfaction de la population. A partir du 16 avril 1917, la première grande grève se développe. Le Reichstag s'agite et souhaite une paix sans annexion. Bethmann-Hollweg est de plus en plus critiqué au Reichstag et dans l'entourage de l'Empereur. Influencé par son environnement, Guillaume II accepte de nommer à la chancellerie Michaelis, administrateur honnête et apprécié, mais sans expérience politique, et qu'il connaît à peine. A partir de ce moment, Guillaume II sent que son pouvoir décline en faveur de militaires comme Hindenburg et est conscient de la césure.

Après la démission de Bethmann-Hollweg, on constate un déclin sensible du rôle politique du souverain, même s'il a de bonnes relations avec Michaelis qu'il apprécie. Mais le chancelier dépend très étroitement du haut commandement militaire, tandis que le Reichstag s'affirme de plus en plus. Très vite, les relations entre le Reichstag et le chancelier se détériorent. Les partis de la majorité exigent bientôt sa démission et le 23 octobre, remettant à l'Empereur une note verbale précisant leur position et demandant que le futur chancelier définisse un programme avec eux sur une révolution en faveur d'une paix, avant sa nomination.

Finalement, l'Empereur accepte la démission du chancelier Michaelis et nomme Hertling, le 1er novembre 1917. Le Reichstag a joué le rôle décisif dans cette nouvelle crise. C'est lui qui impose le départ de Michaelis qui a la confiance de Guillaume II et que le haut commandement trouve commode. C'est un début de parlementarisation du régime politique. Hertling négocie, mais est pourtant contesté par Ludendorff. Trop pessimiste sur la victoire allemande, il est exigé son départ par Hindenburg, ce qui est accordé par Guillaume II. L'Empereur devient le jouet de son entourage et du haut commandement. L'impératrice a aussi une grande influence sur son époux. Dès août 1918, il n'y a plus d'espoir de victoire militaire, mais on espère encore pouvoir stopper l'avance ennemie en se repliant sur la ligne Hindenburg et négocier une paix honorable. La défaite à l'Ouest et la parlementarisation posent la question de l'abdication de Guillaume II.

Le 10 août, Hindenburg avertit l'Empereur, après l'échec de la Marne et le succès de l'attaque britannique sur la Somme " le jour le plus sombre de l'armée allemande", que l'Autriche-Hongrie est au bord de l'effondrement et qu'on ne peut plus espérer de victoire militaire à l'Ouest. Guillaume est calme et déclare aux militaires silencieux : "Il faut faire le bilan. La guerre doit être achevée !". Après l'offensive victorieuse des Britanniques à Cambrai, Guillaume II connaît un effondrement nerveux et déclare : "La guerre est perdue !". En désaccord avec Hindenburg, le chancelier Hertling démissionne. Guillaume II demande des négociations avec Wilson et veut signer la paix au plus vite. Le 3 octobre 1918, sur les instances de Ludendorff, le Kaiser nomme Max-de-Bade à la chancellerie. La situation en Allemagne est critique. Le peuple se soulève contre le pouvoir et veut l'abdication du souverain. Le Reichstag et même l'Armée exigent le départ de Guillaume II. De plus, les marins se révoltent les 3 et 4 novembre 1918 à Kiel. Le mouvement se diffuse dans le Nord et gagne toute l'Allemagne. Des grèves à Berlin marquent aussi la protestation contre le souverain. Conseillé par Hindenburg, Guillaume II abdique le 9 novembre 1918 et quitte l'Allemagne le lendemain à 5 heures pour la Hollande où il est accueilli par l'Ambassadeur d'Allemagne. L'Empire allemand a été créé par une guerre victorieuse, il s'effondre avec la défaite...

11) L'exil en Hollande (1918-1941)

Guillaume II a presque soixante ans lorsqu'il abdique après trente années de règne. Son exil en Hollande dure près de 23 ans. A partir de 1920, il vit dans un petit château à Doorn, isolé du monde extérieur par son entourage et un cérémonial à peine simplifié, espérant, du moins jusqu'en 1934 une restauration monarchique, nourrissant sa rancour à l'égard de ceux qu'il est estime être responsables des échecs de son règne, persuadé d'être une victime, un héros chrétien ayant tout perdu, sauf l'honneur, convaincu de son talent exceptionnel.

On pense, après le Traité de Versailles, à juger l'ex-Empereur, accusé d'être la principale cause du conflit 1914-1918. Mais on abandonne cette hypothèse, les Alliés étant divisés.

Après dix-huit mois passés chez le comte Bertinck, Guillaume s'installe le 15 mai 1920 dans un petit château de la fin du XVIIIe siècle à Doorn, qu'il a acquis en août 1919 et qu'il a fait entièrement rénover. L'impératrice Augusta-Victoria arrive en Hollande le 28 novembre 1918 dans un état physique très précaire. Souffrant du cour et de problèmes circulatoires graves, elle ne quitte sa chambre qu'en chaise roulante. Décédée le 11 avril 1921, elle est enterrée dans le mausolée royal du nouveau palais de Potsdam. Cela n'empêche pas Guillaume d'épouser, le 5 novembre 1921, à la surprise générale, la princesse Hermine zu Schönaich-Carolath, veuve d'un riche noble silésien, âgée de trente-cinq ans.

Guillaume II jouit d'une excellente santé. Il se livre à sa passion de l'abattage et du sciage des arbres, soigneusement comptabilisés. Après de faux espoirs de restaurer la monarchie avec Hitler et plusieurs accords, Guillaume se réjouit pourtant de l'avancée allemande en 1940 et pense que c'est la revanche de 1918. Mais Guillaume II ne connaît que les succès allemands. Malgré une excellente santé pour son âge, il est pris d'un malaise le 1er mars 1941 alors qu'il coupe du bois. Après une amélioration, il subit une nouvelle attaque cardiaque et meurt le 4 juin 1941, à l'âge de quatre-vingt-deux ans.

Hitler avait ordonné, fin mai, de préparer ses funérailles nationales, mais la famille décide de respecter l'ordre dicté à Noël 1933 par Guillaume II, qui prévoit son inhumation à Doorn, sauf en cas de restauration de la monarchie.

L'enterrement a lieu le 9 juin devant une large assemblée de membres de la famille, venus en train spécial

 

Finit d'écrire le vendredi 24 octobre 2003,

D'après Guillaume II d'Allemagne

Benjamin HUS